« Si nous voulons la pleine citoyenneté de tous, nous [femmes] sommes incontournables ! »
Le ton a été donné, par Yasmina Touaibia, lors de la conférence au Palais des congrès de Grasse : « Femmes en Résistances » organisé par le Festival Transméditerranée à l’occasion -indiquait Paul Euzière- des 20 ans de la Conférence mondiale des femmes organisée à Pékin par l’ONU en 1995.
Une occasion de "faire le point sur les progrès et aussi difficultés" dans les batailles pour une pleine égalité Hommes-Femme tant au Sud de la Méditerranée qu'à l'Est ou au Nord où là comme ailleurs, rien n'est définitivement gagné ni acquis.
Qu’on les appelle Code de la famille en Algérie (le « code de l’infamie » pour les Algériennes…), Code du statut personnel en Tunisie ou Moudawana au Maroc, malgré d’incontestables progrès dus à des combats incessants, cette égalité est loin d’être acquise.
Entre l’Algérie la Tunisie et le Maroc les différences sont sont nombreuses.
Un exemple parlant : celui de l’Algérie où une femme, rendue mineure à vie par le Code de la famille, peut -paradoxalement- prononcer la peine capitale en tant que magistrate. La Magistrature algérienne compte 52 % de femmes.
Donc, si pour une décision personnelle comme se marier, par exemple, l’Algérienne est soumise à l’autorisation d’un « mâle » de la famille, elle peut en tant que magistrate -elles sont nombreuses à l’être- décider de la peine de mort (qui fait toujours partie , même s'il elle n'est plus appliquée, de l'arsenal pénal algérien..
La Tunisie a été longtemps montrée en exemple car le Code du statut personnel promulgué par H. Bourguiba en 1956 tend vers l’égalité. ceci dit, de nombreuses zones d’ombres demeurent notamment par rapport à l’éducation.
Khadija Cherif a démontré comment le champ sémantique a glissé avec l’arrivée des islamistes d'Ennahda au gouvernement. La Laïcité devient tabou car elle serait un concept d’athées et d'adversaires de la religion.
« Il faut encore et encore expliquer, faire de la pédagogie » car la laïcité -la séparation de l'Etat et de la religion- est à la fois la garantie de liberté de culte pour tous et la liberté individuelle de croire ou ne pas croire.
Au nord de la Méditerranée aussi, ce débat a traversé la société française avec les tentatives permanentes de remise en cause de la loi de 1905.
Même constat au Maroc. Car même si elle a évolué dans le bon sens, la Moudawana est -comme tous les textes juridiques- sujette à interprétations.
Ce sont d’ailleurs les associations féministes qui ont mis au point des « kit » de formation pour aider les magistrats marocains à appliquer les nouvelles lois a rappelé Saadia Drissi Amrani.
Paradoxe des processus de démocratisation et des luttes menées pour les droits des femmes, avec l'élection en Tunisie et au Maroc de nombreuses députées femmes issues membres de partis islamistes (Ennahda et PJD), les droits des femmes ont été remis en cause. C'est seulement la mobilisation des associatiosn féminines et de la société civile qui a permis de mettre en échec un retour en arrière qui serait catastrophique tout auatnt pour les femmes que pour les sociétés.
Tunisiennes, Algériennes, Marocaines se battent pied à pied, dans un contexte difficile, car il n’est jamais l’heure de parler égalité des femmes, il y a toujours « plus urgent ».
Certes les menaces terroristes au Nord comme au Sud semblent reléguer leur situation après d’autres urgences.
Pourtant ces trois intervenantes passionnées et passionnantes avec leur parcours ont démontré que partout, que ce soit en Méditerranée ou ailleurs, il ne peut y avoir de citoyenneté sans égalité et que la situation de la Femme est toujours un enjeu essentiel pour l’évolution ou la régression d’une société.
Un combat de tous les instants où jamais rien n’est acquis au Sud au Nord à l’Est ou à l’Ouest.
solution
L'évolution des sociétés dépend de cette égalité, un enjeu vital pour une citoyenneté pleine et entière.